Geoffroy de Pompadour ( 2 )

 

     Les comptes de l'expédition permettent d'avoir une idée de la violence de l'attaque. Après cet échec, Geoffroy choisit alors la voie légale. Les procès seront nombreux et contradictoires, les bulles pontificales succèdent aux lettres patentes et, finalement, la mort de l'archevêque de Bordeaux laisse la voie libre à Geoffroy. Le ministère de Geoffroy laisse des traces dans les archives locales, en voici une concernant un boucher interdit d'exercer pour "avoir vendu de la truye pour du cochon ".
     
Mais Geoffroy est appelé à d'autres charges. Il obtient par élection le siège épiscopal d'Angoulême à la place de Robert III de Montbron le 24 juillet 1465. Deux ans plus tard, il représente le clergé aux états généraux.

La cathédrale Saint Front de Périgueux, cliché extrait du guide européen des chemins de Compostelle
La cathédrale Saint Front de Périgueux 

     En 1470 Geofroy quitte Angoulême pour l'évêché de Périgueux. Il fera également son entrée à la Cour de France comme exécuteur testamentaire de Charlotte de Savoie, mère de Charles VIII.
En Dordogne, il entreprend de relever l'abbaye de Cadouin et d'y réintégrer sa précieuse relique, le Saint Suaire déposé à Obazine en Limousin. Pour la bonne conservation de la relique, il obtient de Louis XI le prélèvement d'un impôt sur la province.
Toujours bien en cour, notre évêque reçoit de nombreuses récompenses pour ses services. Il reçoit le titre de Premier Président de la cour des comptes. Geoffroy excelle dans la gestion des finances. Il sera le premier Grand Aumônier de France, charge qu'il conservera jusqu'à sa mort, puis négociateur dans le cas épineux du cardinal de Balue. 

      Mais des nuages sombres se profilent à l'horizon. Geoffroy, allié indéfectible de la famille des Orléans, intrigue avec d'autres ecclésiastiques contre Anne de Beaujeu, régente pendant la minorité de Charles VIII. Les conjurés projettent un faux enlèvement du futur roi pour le soustraire à la tyrannie de sa sœur. Anne de Beaujeu est informée de la machination. Les prélats sont incarcérés à Mehun sur Loire et traduits devant le Parlement de Paris pour haute trahison. Quoique derrière les barreaux, Geoffroy s'oppose à la nomination de Jean de Laurière à la charge de président de la cour des comptes. Le maître d'hôtel du Roi qui doit garder les deux évêques, informe les envoyés du Vatican qu'il a surpris des lettres des prélats, rédigées en latin, langue qu'il ne comprend pas. Le pape Innocent VIII, déjà échaudé par l'affaire du cardinal de Balue, a envoyé nonces et enquêteurs pour assister ses évêques inculpés. Après une longue enquête et de nombreuses auditions, le parlement rend une sentence de compromis. L'accusation de haute trahison n'est pas retenue : les prélats ont agi pour protéger le futur roi et non pour lui nuire. Cependant ils seront exilés dans leurs diocèses.

     Geoffroy se défait de ses charges de président de la cour des Comptes et de la cour des Aides et rentre dans son nouveau diocèse du Puy en Velay. Il fait son entrée officielle dans sa ville épiscopale le 28 septembre 1486, tout en conservant l'administration de l'évêché de Périgueux aux dépens de Gabriel de Mas, pourtant nouveau titulaire de la charge. Mais ce dernier meurt avant de pouvoir faire valoir ses prétentions. Au fil des années, Geoffroy retrouve sa place au sein de la cour de France. Charles VIII effectue le pèlerinage de Notre Dame du Puy en Velay au retour de la campagne d'Italie.

Le Puy en Velay, cliché extrait du guide européen des chemins de Compostelle

     Le Roi meurt accidentellement peu après. Geoffroy de Pompadour assistera à ses obsèques, puis se rendra à Reims pour participer au couronnement de son ancien protégé Louis XII, fils de Charles d'Orléans.

Le château de Pompadour face sud

     L'année 1502 sera la plus importante du ministère de Geoffroy de Pompadour, avec le grand Jubilé de la Vierge du Puy en Velay. La coïncidence de deux fêtes religieuses en ce printemps 1502 provoque une telle affluence au Puy "que l'on auroit dit que l'Italie l'Espagne et l'Angleterre s'étoient épuisées d'habitants". Les bousculades causent des centaines de victimes. L'évêque fait prendre des mesures de police pour contenir la masse des pèlerins qui ont déjà piétiné beaucoup de récoltes pour parvenir au Puy tant la capacité des voies de communications est insuffisante. D'autre part, pour le spirituel, il s'assure de la présence de plus de trois mille confesseurs .
Sa présence au mariage de sa petite nièce Marguerite de Pompadour avec le vicomte de Polignac et de son petit neveu François de Pompadour, vicomte de Comborn avec Anne de la Rochefoucauld mettra un terme à sa vie publique.

     Geoffroy de Pompadour meurt le 8 mai 1514. Conformément à ses dernières volontés, il aura sa sépulture dans l'église d'Arnac.
 Tout au long de son ministère, Geoffroy contribue à la prospérité de la vicomté de Pompadour confiée à son frère Jean II qui administre en son nom et dont il sera l'usufruitier puis l'exécuteur testamentaire à la mort de celui-ci en 1502. En 1500 Jean II cède à Jean de Lubersac tous ses droits sur le repaire du Verdier pour la somme de quatre-vingt-dix-sept écus d'or. La prospérité des Pompadour est considérable. Le château prend son caractère Renaissance avec une foule de dépendances, l'église d'Arnac se dresse plus majestueuse encore.

La prieurale d'Arnac

Pierre ornée d'un G majuscule en relief sur un mur du château de Pompadour

     La Révolution et les blessures du temps nous privent aujourd'hui d'une partie de ses réalisations. Cependant, quelques pierres heureusement conservées au fil des reconstructions, marquent de façon indélébile la signature de notre évêque. La majesté du château et de la prieurale d'Arnac témoigneront encore longtemps du faste souhaité par Geoffroy de Pompadour, évêque du Puy en Velay et de Périgueux, titulaire de prébendes dans l'église de Lyon, des Abbayes de Notre Dame de Chancelade, Saint Amand de Boixe, des prieurés de Saint Cyprien en Sarladais, Saint Jean de Côle en Périgord, prévôt de Saint Pardoux et d'Arnac.


Pour conclure, je livre le portrait de Geoffroy dressé par A. Jouannel dans un article des sociétés savantes du Périgord :
"Il me plairai de le voir à cheval casque en tête, rapière au côté, croix épiscopale étincelante sur sa cuirasse d'acier, très féodal et très gentilhomme au milieu de gens d'armes bardés de fer "